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1909 • C'est à Morez du Jura que les compétitions pour le Championnat de France ont lieu du 31 janvier au 2 février. Avec des résultats réguliers dans toutes les épreuves des deux disciplines (saut et fond) comptant pour le titre, Alfred COUTTET empoche son premier titre de Champion de France et termine même premier du classement général des épreuves de saut. À 19 ans, il détrône le Lieutenant Alloix (Champion de France militaire 1907 et 1908) et devient ainsi le premier Champion de France de Ski civil de l'Histoire du Ski Français.
À l'époque pour obtenir ce titre, les skieurs devaient réaliser les meilleures performances durant toute la saison des compétitions, et cela, à la fois en saut et dans les courses de fond (10 à 30 km) et à partir de 1913 dans les courses de grand fond (60 km). Alors que les sauteurs français passaient le tremplin plutôt qu'ils ne le sautaient véritablement, il fut reconnu que le style et l'attitude du jeune et nouveau Champion étaient absolument corrects et il ne fut plus question de sauts de quelques mètres, mais de 18 à 20 mètres, alors que les Scandinaves, maîtres incontestés du ski mondial, restaient hors-concours avec des sauts de 25 à 27m50. Avec de pareils sauts, COUTTET CHAMPION pouvait faire figure d'outsider en représentant la France dans les Concours Internationaux.
Ses exploits de skieur s'entendirent jusqu'à Paris et traversèrent les frontières. C'est ainsi que pour la première fois un skieur français fut invité par le Roi de Norvège en personne à venir se frotter aux Scandinaves lors des mythiques épreuves d'Holmenkollen. Le gouvernement français soutiendra son Champion et Alfred COUTTET sera accompagné pour l'occasion par toute une délégation officielle emmenée par l'Ambassadeur de France.
Contre les 60 meilleurs Scandinaves de la catégorie 18/20 ans, notre CHAMPION réalisera l'exploit inouï de terminer 11ème et 12ème au Concours de Saut sur le célèbre tremplin d'Holmenkollen !
En Norvège, aux Holmenkollrennen, les concurrents étrangers se sont distingués, malgré le lot important de coureurs norvégiens auxquels ils se mesuraient. Parmi les premiers se trouvaient MM. le Dr Biehler, Bruno Biehler, le Dr K. Gruber, Iklé, de Saint-Gall, et Alfred Couttet, de Chamonix, notre champion de France. M. Huitfeld appréciant les coureurs, dit au sujet de ce dernier :
Il y eut chez les spectateurs beaucoup d'étonnement en voyant évoluer le Français, M. Couttet, de Chamonix. Si l'on considère que l'on ne pratique en France le sport du ski que depuis peu d'années, et que, cependant, en si peu de temps l'on a pu en acquérir toutes les finesses, nous croyons fermement qu'il nous faut en prendre bonne note et nous préparer pour les luttes futures. M. Couttet a, sans tomber, fait un saut pour ainsi dire irréprochable. Sa tenue et sa manière de diriger ses skis n'étaient guère inférieurs aux sauts et aux procédés de nos meilleurs compatriotes. La participation de ces étrangers à nos concours est un événement qui marquera une date dans l'histoire de notre sport national. Nous les remercions encore une fois d'être venus y prendre part et souhaitons de les revoir à la prochaine occasion.
[passage extrait de la revue mensuelle du Club Alpin Français pages 242/243 | La Montagne - Nouvelle Série - 5ème année - N°1 - 20 janvier 1909]
1910 • Cette année-là, COUTTET CHAMPION s'octroie les premières places du classement national et du classement international de saut qui ont lieu à Eaux-Bonnes, Gourette et Cauterets du 21 au 30 janvier. Hélas, cela ne fut pas suffisant pour conserver le titre, ses résultats en fond étant mitigés.
1911 • Je n'ai trouvé aucune information sur cette année-là.
1912 • Cette année, Alfred est sous les drapeaux. Les concours de ski se font par équipes et interarmées. Ce sont les courses de patrouille avec armes, chargement et vivres sur le dos. Promu au grade de Caporal, il court aux côtés du Lieutenant Ance et des chasseurs Mangard et Belin dans l'équipe du 11ème BCA. C'est son équipe qui remporte la compétition pour les équipes françaises en 4 h 42'34" alors que la première équipe suédoise sans armes, ni chargement a mis 4 h 13'32". Autrement dit, la concurrence fut écrasée littéralement.
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1913 • Gérardmer du 1er au 4 février • COUTTET CHAMPION reprend son titre.
1914 • Pontrésina en Suisse - 17 et 18 janvier • Pour la première fois une équipe française est envoyée au Concours annuel de l'Association Suisse des Clubs de Ski. L'équipe de France comprenait les Jurassiens Vandelle et Vuillet, le Parisien Jacques Weiss pour le saut uniquement et bien sûr le champion Alfred COUTTET. Celui-ci termina au pied du podium alors que Vuillet se classait 8ème et Vandelle terminait 17ème pour cause de bâtons cassés aux 2/3 du parcours. Quant à Weiss, il réussit un superbe saut de 31 m, le meilleur saut du concours ayant été de 33 m.
Cette année là, le VIIIème Concours International de Ski devait avoir lieu à Briançon-Montgenèvre du 6 au 9 février mais l'absence de neige fit ajourner la compétition. C'est alors que Chamonix, bien enneigé, s'offrit spontanément pour organiser le Championnat de France qui fut réduit à deux épreuves auxquelles devaient obligatoirement prendre part tous les concurrents. La date fut fixée au 24 février, épreuve de fond le matin, saut l'après-midi. Alfred COUTTET se placera 5ème de l'épreuve de saut malgré une blessure.
À l'issue de la saison des compétitions, COUTTET CHAMPION termine 1er du classement général des épreuves de fond et ses résultats en saut sont excellents, le voilà une fois encore Champion de France…
juste avant que la Grande Guerre (14/18) ne l'oblige bien malgré lui à renoncer à sa carrière de skieur de haut niveau.
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1924 • Retour du Champion. Le Concours annuel eut lieu à Briançon les 16 et 17 janvier et servit d'éliminatoire aux Premiers Jeux Olympiques d'Hiver de Chamonix. Alfred COUTTET qui n'a pas quitté le monde du ski, participe à cette épreuve. Gilbert Ravanel, Payot, Kleber Balmat, Vandelle et COUTTET CHAMPION prirent les premières places du fond et du saut. Chamonix sera la première ville organisatrice des Jeux d'hiver. Soutenue par un temps des plus favorables, l'organisation fut parfaite. Il fallait à la France un entraîneur pour ses skieurs, c'est Alfred COUTTET qui sera nommé Capitaine des Équipes Françaises de Ski. En acceptant cette charge, il renonça, la mort dans l'âme, à sa participation aux jeux en tant que compétiteur.
Au point de vue entraînement, qu'a-t-on fait ? Là, il faut cesser les louanges. J'ai rencontré Alfred Couttet, trois fois champion de France, notre meilleur homme sur skis. Couttet est désolé. On lui a demandé d'être le capitaine de l'équipe française et d'entraîner nos concurrents. Mais on l'oblige, s'il accepte, à renoncer à prendre part lui-même aux différentes épreuves. Sommes-nous donc si riches en champions ou en espoirs pour nous permettre de nous priver de ses services effectifs ? Hélas !…
« Je ne vois personne pour me battre chez nous. m'a-t-il dit, les larmes dans les yeux. Pourquoi me contraindre à rester inactif ? J'étais blessé l'an dernier, mais cette année je pourrais faire mieux que bonne figure.
« — Quels moyens vous donne-t-on pour vous entraîner, vous et les autres ?
« — aucun. Nous ne sommes tous que de pauvres bougres, qui vivons de leçons ou de notre métier de guides. Pour nous entraîner, nous rembourse-t-on notre manque à gagner ? Non pas. De plus, on me dit : « Vous irez à tel ou tel endroit pour vous exercer ». Et je n'ai pas voix au chapitre pour faire observer que l'endroit est trop loin ou que la neige y est mauvaise.
« — Alors ?
« — Alors, sur 40 concurrents pour le tout, par exemple, nous nous classerons sans doute dans les dix derniers.
« — Et pour la course de skis, quelle est notre chance ?
« — De nous classer dans les dixième.
« — La France ne brillera guère…
« — Si, dans les concours de figure de patinage… C'est maigre, évidemment. Que voulez-vous, dans les autres pays ils ont d'autres moyens. Regardez en Suisse. Ils ont un fameux champion : Girarlbile mais voilà un garçon qui est rudement aidé et secondé. Il n'est pas payé, certes, mais il est reçu à l'œil dans tous les hôtels : cependant on lui donne une indemnité de 100 francs par jour pour ses frais. On deviendrait champion à moins ! »
Le champion de France exhalait avec douceur son amertume. Je ne pus lui donner aucun apaisement. Je sentais trop bien qu'il avait raison et que toute sa bonne volonté se heurterait toujours à l'inertie de… Mais ne nommons personne ; il y a trop de responsables !
Cependant, pour me consoler, je songeai que si les Français n'avaient point de chance de briller aux sports d'hiver olympiques de janvier-février 1924, tout au moins la France remporterait un beau succès d'estime pour la beauté du site et l'excellence de l'organisation.
[passage extrait d'un article de presse de Serge Yeber intitulé "Les Jeux Olympiques, le décor et les artistes" | Journal L'auto du jeudi 18 octobre 1923]
On le sollicitera également en lui demandant de mettre son expérience au profit de l'organisation des Jeux. C'est ainsi qu'il prendra part à la conception du premier tremplin Olympiques construit au Mont en dessinant la courbe de la piste d'élan. Pour ces tous premiers jeux, six sports sont au programme Olympique : le hockey sur glace, le patinage de vitesse, le patinage artistique, le curling, le bobsleigh et bien sûr le ski, où seules les disciplines nordiques masculines sont proposées. Une solide équipe de skieurs à forte coloration chamoniarde a l'honneur de défendre les couleurs françaises dans les 5 épreuves de l'époque : le grand fond (50 km), le fond (18 km), le saut, la course combinée (saut + fond), et la course militaire par équipe de 4 (30 km). Cette dernière discipline Olympique fut en quelque sorte l'ancêtre de l'actuelle épreuve de Biathlon.
Alfred COUTTET a donc en charge l'entraînement de ces sauteurs et fondeurs de la première heure. Mais les vaillants pionniers arrivent plutôt en petite forme à l'heure H. Le Capitaine explique :
"Je n'ai pu vérifier si j'avais été un entraîneur efficace, car ayant été logés dans une caserne où un bataillon entier avait été décimé par la grippe, les coureurs français se présentèrent au départ de la course de fond, toussant, crachant, le mouchoir à la main. Ils étaient dans un si triste état qu'ils ne firent rien de bon."
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Ci-dessus, Couttet Champion réalisant le saut d'ouverture des épreuves de saut à ski sur le tremplin olympique du Mont.
Les meilleures places des Français seront réalisées :
1973 • Je n'avais pas 10 ans quand mon grand-père, COUTTET CHAMPION prit une fois encore le départ d'une course de ski. C'était un slalom géant. Parmi les concurrents, il y avait James COUTTET, son élève de la première heure, Champion du Monde de vitesse à 16 ans et Médaillé d'Argent aux Jeux Olympiques de 1948 à Saint-Moritz. COUTTET CHAMPION finit 1er et seul concurrent de la catégorie 80-84 ans : il a 84 ans !
Et s'il n'avait pas de concurrents directs au vu de son âge, son temps fût loin d'être ridicule puisqu'en vitesse pure, il devança des concurrents bien plus jeunes !
Interview de Bruno Couttet par la journaliste chinoise Jinjin Ma de la CCTV (China Central Televison) réalisée le 7 décembre 2021 à Chamonix.
Diffusion en français le 19 décembre 2021 sur la chaîne chinoise d'information internationale en continu CGTN (China Global Television Network).
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